Préparée et réalisée par Didier Fouquesolle
Photos © Pascal Bomy
Lardy (91), par un après-midi de décembre plongé dans la léthargie brumeuse de cette fin de week-end, Le Pélican, presque vide, les musiciens qui s’installent sur l’estrade et font les balances. La température et le volume des discussions montent au rythme du bar et des verres se remplissent...
Enfin débute le set dans l’atmosphère surchauffée de la petite salle qui peine à contenir tout le public. County Jels, à coups de guitares affutées, de riffs ravageurs et d’une rythmique qui bastonne, nous offre de larges extraits de l’album 2227 et de reprises de Johnny Winter, Professor Longhair… La part belle est faite aux instruments, le chant est minimaliste.
À la pause, dans l’arrière-salle, Éric Sauviat et Laurent Cokelaere acceptent amicalement de répondre à nos questions.
Blues Magazine > Que signifie le nom du groupe ?
Eric Sauviat > C’est un jeu de mot entre County Jails, les prisons du comté, et nos initiales.
BM > Qui sont les musiciens du groupe ?
ES > Il y a Sébastien Chouard (guitare), Laurent Cokelaere (basse), Julien Audigier (batterie) et moi-même (guitare et chant).
BM > Comment est né le groupe ?
Laurent Cokelaere > County Jels est né d’un trio, un peu informel, d’Eric Sauviat.
ES > Je faisais des reprises de Blues en trio, et j’invitais parfois sur scène d’autres musiciens, clavier, harmoniciste ou guitare. Et un soir, c’était Sébastien, avec qui il s’est passé un truc vraiment bien, d’où l’idée de garder cette formule et d’aller un peu plus loin.
LC > Il y a eu une alchimie, un feeling. Instinctivement, les deux guitares arrivaient à se placer de façon naturelle, très librement.
ES > De l’imprévu, de l’impro, c’est du Blues, le plaisir de jouer.
BM > Auparavant, vous avez beaucoup tourné avec des artistes dans des registres différents. Qu’est-ce-qui vous a poussé à faire cet album de Blues ?
ES > Simplement le désir de faire ce qu’on aime, de se faire plaisir en jouant la musique qui nous touche, que ce soit du Folk, du Blues ou du Rock. L’album est un mélange teinté de Soul de toutes ses influences.
LC > En fait, c’est la musique que j’écoutai quand j’avais 14 ans.
BM > Comment s’est passée la phase d’écriture, quelle a été la place de chacun de vous ?
ES > On s’est retrouvé ensemble, personne n’avait préparé de maquettes de son coté.
LC > On a presque boeuffé, ça a été enregistré dans les conditions du live, de façon instinctive, sans trop savoir où nous allions. Et nous sommes très contents de cette spontanéité qui existait dans certains enregistrements des années 70. C’est génial d’enregistrer dans ces conditions.
BM > Pour vous, l’Anglais est une évidence pour chanter le Blues. Pourtant, deux titres sont en français. Est-ce un clin d’œil à vos racines ?
LC > Oui, mais les paroles en anglais pour l’un, et l’autre c’est un instrumental. On s’est un peu amusé.
ES > Pour Boulleville, c’est un petit clin d’œil : c’est le nom d’un village de Normandie, à proximité du studio d’enregistrement.
BM > Que pensez-vous du Blues chanté en français ?
LC > Il y a une manière de le faire. Certains artistes, comme Bill Deraime ou Patric Verbeke avec qui j’ai tourné, le font très bien. Nous ne sommes fermés à rien. Pour le moment, l’évidence, c’est l’Anglais.
ES > La difficulté de l’exercice de style, c’est de ne pas tomber dans la variété. Je ne me considère pas comme chanteur. Même si la voix, parfois, peut être mise en avant, je la considère plus comme un instrument pour créer un climat, une ambiance. J’accorde beaucoup plus d’importance à jouer de la guitare.
BM > Le CD 2227 (Cf. Blues Magazine n°79) est maintenant sorti depuis quelques mois. Quels sont les échos ?
LC > Les retours sont bons. On a fait des articles, des concerts, dont le Festival de Montereau Confluences, et ça commence à se préciser pour d’autres dates.
BM > La difficulté est peut-être d’arriver à vous retrouver ensemble ?
LC > Oui, nous avons même refusé quelques dates. Nous avons chacun d’autres activités, accompagnons d’autres artistes. Actuellement, en tant que musiciens professionnels, les tournées sont le moyen de vivre pour nous.
BM > Quels sont vos projets à venir ?
ES > Faire vivre notre musique, voir comment ça s’enchaîne, pouvoir mettre en place une petite tournée.
LC > Nous avons en vue quelques dates de festivals, mais l’album est sorti trop tard dans la saison.
ES > Nous avons commencé à poser quelques notes pour un prochain album, et nous devrions rentrés en studio bientôt.
Mais déjà tinte la cloche du bar, annonçant la fin de notre entrevue et la seconde partie du set. Remercions les patrons du Pélican, pour leur accueil et leur fidèle soutien porté à votre magazine et à nos musiques préférées.
Contacts : www.atlantidemusic.biz
Le-pelican-lardy.over-blog.com
COUNTY JELS
2777
Atlantide Music
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Ce 1er opus est un road trip à travers les époques et courants Rock et Blues aux États-Unis. Du Chicago Blues au Boogie texan, de riffs gras en shuffles nerveux, de mélodies roots acoustiques fleurant bon le Delta du Mississippi et les origines, parmi les 10 compos et les 2 reprises chantées en anglais, 2 titres en français nous interpellent : les County Jels seraient-ils de chez nous ? Cette galette est née dans la campagne normande, fruit des 1ers émois musicaux, des références anglo-saxonne de ces 4 gars qui ont fait leurs armes auprès d’artistes divers et variés de la scène française et internationale. Ils considèrent, avec raison, que leur style appartient plus à la culture universelle, et c’est une évidence de chanter en anglais, car pour eux, le français n’est pas la langue du Rock. Leur nom, un jeu de mot entre county jails, les prisons du comté, et JELS, les initiales de leurs prénoms. Aux guitares et voix, les 2 frères de manches, coté Blues au slide Eric Sauviat et coté Rock Sébastien Chouard, se complètent en harmonie, les guitares se croisent sans jamais se télescoper. À leur côté, une rythmique qui bastonne, la basse lourde et solide de Laurent Cokelaere et les beats surchauffés de Julien Audigier à la batterie. Un très bon album qui me laisse impatient de les découvrir sur scène.
Didier Fouquesolle