Préparée et réalisé par Dominique Boulay
Photos © Éric Dalele

Nous avons fait la connaissance de ce talentueux guitariste grâce à Archie Lee Hooker, puisqu’il est membre du Coast To Coast Blues Band qui accompagne ce dernier. Il a également été sideman de nombreux artistes et groupes de Blues et de Rock au Brésil et aux États-Unis. Son 1er album Moving Home étant sorti en octobre, il était opportun de faire sa connaissance.


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Blues Magazine > Toi qui es brésilien, comment et pourquoi te retrouves-tu en Europe aujourd’hui ?

Fred Barreto > Oui, je suis brésilien, natif de Salvador da Bahia. Je suis venu en Europe pour jouer au Montreux Jazz Festival pour sa 39ème édition en 2005 (où se produisaient également BB King, Billy Preston, George Benson, Isaac Hayes, Alice Cooper, Queens of the Stone Age et Eagles of Death Metal), avec un artiste brésilien et j’ai fini par rester ici. Je me suis dit : eh bien, j’ai ma guitare avec moi et un peu d’argent. Pourquoi ne pas rester un peu en Europe ? Après le festival, je suis allé en Allemagne rendre visite à des amis. Ensuite, je suis allé au Portugal pour jouer avec une chanteuse de Blues brésilienne, Clara Ghimel, qui vit toujours là-bas. Après avoir vécu au Portugal pendant un peu plus d’un an, j’ai déménagé en Allemagne et j’y vis depuis.

BM > Dans le Top 50 des plus grands artistes brésiliens, il y a peu de groupes de Rock (Sepultura, Soulfly ou Angra), et encore moins de Blues (Nuno Mindelis)... Décris-nous brièvement ton parcours musical ?
FB > Eh bien, en tant que bon Brésilien, à cause de mes parents ou grâce à eux, j’ai écouté beaucoup de bonnes musiques brésiliennes dans mon enfance (Antonio Carlos Jobim, Baden Powell, Caetano Veloso, Gilberto Gil, entre autres). Mais, hors de chez moi, avec mes amis, j’écoutais des groupes de Rock brésiliens, ainsi que les Beatles et les Rolling Stones, et c’est là que mon intérêt pour la guitare a commencé. J’ai toujours été plus dans le Blues et le Rock. Je ne me suis jamais vraiment intéressé au Heavy Metal, par exemple. Ensuite, je ne peux pas vraiment dire que des groupes comme Sepultura et Angra, par exemple, m’ont influencé. Au lieu de cela, des groupes de Blues et de Rock brésiliens, comme Nuno Mindelis ou Mutantes ont été une grande source d’inspiration pour moi. C’est juste parvenu à l’âge adulte, que j’ai commencé à aimer et à écouter des groupes comme Sepultura et Soulfly.

BM > Comment as-tu commencé à travailler dans le groupe de Blues d’Archie Lee ?
FB > Après qu’Archie ait déménagé en Europe en 2011, il a décidé d’avoir son propre groupe ici. À l’époque, il jouait avec Carl Wyatt et son groupe en tant que chanteur. Il a demandé à Yves Deville Ditch, le batteur de Carl, de jouer avec lui et de l’aider à monter un groupe. Yves a alors suggéré mon nom. Archie ne savait pas grand-chose de moi et de mon jeu, mais après la 1ère répétition, je pense qu’il a été convaincu que j’étais le gars qu’il recherchait (rires). Tu sais que c’est vraiment sympa de travailler avec Archie, car parmi toutes les bonnes choses que l’on peut vivre avec lui, Archie laisse ses musiciens être très libres, musicalement parlant. Je ne suis pas seulement là pour jouer de la guitare, mais aussi pour être créatif, et cela fait une énorme différence et compte énormément.


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BM > Que peux-tu nous dire sur l’origine et les débuts de FBG, basée au Luxembourg, qui existait apparemment avant le groupe d’Archie, ou bien est-ce le contraire ?
FB > Le FBG a vu le jour vers 2009 ou 2010, au Luxembourg, donc avant même qu’Archie ne déménage et arrive en Europe. Dès le début, FBG était censé être un projet parallèle, car j’étais trop occupé à jouer, tourner et enregistrer avec d’autres groupes et artistes. Début 2016, nous avons sorti notre 1er single, So Many Things. L’idée était d’enregistrer et de sortir un autre EP, juste après le single, mais encore une fois, j’étais très occupé et je n’avais pas le temps de travailler dessus. Nous avons juste réussi à enregistrer et sortir l’EP For So Long quelques années plus tard, en 2019. En 2020, lorsque la crise du Covid a frappé et que le verrouillage a été installé, j’ai décidé qu’il était enfin temps de composer et d’enregistrer un album complet. J’ai demandé aux autres ce qu’ils en pensaient, et ils étaient tous d’accord pour qu’on y aille !

BM > Comme pour le Coast To Coast Blues Band, les musiciens du FBG viennent de différentes parties du monde. Peux-tu nous donner plus de détails ?
FB > Eh bien, dans FBG, je pense que je suis le plus exotique (rires). Après cela, nous avons Nadja Prange à l’orgue, du Luxembourg (Nadja a été la dernière à rejoindre le groupe en 2018), Daniel Fastro à la basse, également du Luxembourg. C’est Daniel qui est dans le groupe depuis le plus longtemps, en 2010. Et Michael Stein, à la batterie, vient d’Allemagne. Ce que je trouve très intéressant dans ce groupe, ce sont les différents horizons musicaux de chacun. Nadja, par exemple, vient de la Musique Classique et du Jazz. Daniel, du Hard Rock. Michael Stein du Metal lourd, et moi du Blues et du Rock. Ce mélange fait de nous ce que nous sommes en tant que groupe.


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BM > Tu as donné plus de 150 concerts ces dernières années, ça veut dire que tu es plus un groupe de scène qu’un groupe de studio ?
FB > Oh oui, aucun doute là-dessus. Être sur scène, jouer en direct est ce que j’aime faire plus que toute autre chose en musique. C’est à ce moment-là que je me sens le plus accompli.

BM > Les compositions sont celles des membres du groupe ? J’imagine qu’elles ont vu le jour lors de votre périple musical en Europe ? Qui participe et de quoi chacun s’occupe-t-il ?
FB > La plupart des chansons enregistrées dans cet album ont été, en fait, composées au cours des trois dernières années. Certaines d’entre elles datent même de l’année dernière, pendant le confinement, comme Dream Again, Living and Loving et Moving On. Donc, les paroles sont assez récentes et parlent de la situation réelle que nous traversons tous.

BM > Comment et pourquoi avez-vous décidé d’enregistrer votre 1er album ?
FB > L’idée a toujours été là, attendant juste le bon moment. Comme je l’ai dit précédemment, en raison du confinement, j’ai enfin eu le temps de le conceptualiser et de l’enregistrer. Quelque chose que je ne réussirais pas si j’étais encore en tournée, en concert, ou en enregistrant avec d’autres artistes.


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BM > Es-tu le patron de ton propre label ?
FB > L’album est sorti de manière indépendante et, comme j’ai une société par ailleurs, Rollin’ and Tumblin’, qui s’occupe de l’ensemble de mon activité musicale, nous avons pensé qu’il était logique de sortir l’album à travers elle. Mais Rollin’ and Tumblin’ n’est pas un label en soi, juste un cadre légal dans lequel nous pouvons travailler.

BM > Cela a parfois des accents rollingstoniens, tandis que I Gotta Go, par exemple, me rappelle Gwyn Ashton... Dream Again est un mix entre Kenny Wayne Shepherd et les Beatles. Ce qui t’importe est de faire de la bonne musique ?
FB > Exactement ! Je veux dire que ce qui compte, c’est de faire ce que je pense être de la bonne musique. Certaines personnes pourraient penser que ce n’est pas de la bonne musique. Qu’on le veuille ou non, cette musique est ce qui vient de l’intérieur. Rien n’est forcé. C’est vrai, c’est moi, c’est nous.

BM > Te considères-tu comme un guitariste de Rock, de Blues ou de Blues Rock ?
FB > Tu sais que j’ai passé de nombreuses années de ma vie à me poser cette question. C’est arrivé tellement de fois que je joue dans un groupe de Blues et que les gens viennent me voir, après le concert, et me disent : Ah, tu es un Rocker ! De la même manière qu’il m’est arrivé de jouer dans un groupe de Rock et que les gens viennent me voir et me disent : Ah, tu es un Bluesman ! Donc, apparemment, je suis trop Rock pour être un guitariste de Blues et trop Blues pour être un guitariste de Rock (rires). Ensuite, la seule alternative qu’il me reste est d’être quelque chose entre les deux : un guitariste de Blues Rock.

BM > Quels sont tes guitar heros préférés ?
FB > Comme tu peux l’imaginer, étant guitariste de Blues Rock, j’ai plein de guitar heros (rires). À commencer par les trois J : Jimi Hendrix, Jimmy Page et Johnny Winter. Les trois rois du Blues : BB, Albert et Freddie, SRV, Alvin Lee, Dickey Betts, Duane Allman… Ils m’ont tous influencé d’une manière ou d’une autre. Grâce à eux, j’ai appris quelque chose qui fait de mon jeu de guitare ce qu’il est maintenant.

BM > Dans la vidéo de Living And Loving, tu joues avec une Fender Telecaster. Est-ce ta marque préférée ?
FB > En fait, la guitare que j’utilise dans la vidéo est une Godinho Guitars Tele. C’est une guitare totalement faite sur mesure pour moi par João Godinho, un luthier portugais basé au Luxembourg. C’est sans aucun doute ma guitare préférée ! J’ai possédé et possède toujours de nombreuses marques et modèles de guitares différents, mais cette Tele, de Godinho Guitars, est LA guitare !

BM > Avez-vous des souvenirs particuliers de vos performances Live ?
FB > Je me souviens d’une fois, alors que je jouais avec Archie Lee Hooker dans un café ou quelque chose comme cela, quelque part en France, que tout à coup, une grosse bagarre a commencé. Les gens criaient, les chaises volaient et nous continuions de jouer notre Blues, en regardant tout ce qui se passait juste devant nous (rires). C’était comme si nous étions dans un film de Tarantino (rires), comme si on leur jouait une bande-son pour qu’ils se battent (rires). C’est un truc qui m’a marqué et impressionné !

BM > Quels sont tes projets immédiats ?
FB > Jouer des concerts, être en live autant que possible, diffuser ma musique. J’ai des tournées prévues avec FBG et Archie : Pays-Bas, Royaume-Uni, Portugal. Je suis impatient que cela démarre enfin.

Le vœu de Fred Barreto devrait se concrétiser rapidement, puisque l’on recommence prudemment à ressortir écouter de la musique. Je ne peux donc qu’inviter le plus grand nombre à se rendre à l’un de ses shows, de la dynamite en barre !


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Fred Barreto Group Moving On
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

FRED BARRETO GROUP
Moving On
Socadisc

Il est brésilien, natif de Salvador de Bahia, mais basé au Luxembourg. Cela fait maintenant quelques années qu’il travaille en Europe. Il a joué au Festival de Montreux en Suisse en 2005 avant de découvrir la scène Blues Rock allemande. Nous avons fait sa connaissance en écoutant Archie Lee Hooker et son Coast to Coast Blues Band, puisqu’il fait partie du groupe de celui-ci. Fred Barreto se présente à nous aujourd’hui avec son propre Band qui existe déjà depuis une dizaine d’années. Il joue de toutes les guitares et chante également. Il est en compagnie de Nadja Prange aux claviers (Orgue Hammond, Fender Rhodes et choeurs), de Daniel Fastro à la basse, et de Michael Stein à la batterie. On peut dire qu’il touche sa bille en ce qui concerne ses compositions, tantôt Rock et tantôt Bluesy. Son ami Mike Butcher est presque de toute la partie, puisque c’est lui qui a enregistré et mixé la galette en plus d’avoir composé un titre avec l’artiste sud-américain et de participer musicalement, parlant en jouant du tambourin sur un autre titre. Il faut dire qu’il a participé à la réalisation de bon nombre d’albums, aussi bien à Londres qu’en Belgique dorénavant. Il a d’ailleurs collaboré avec une multitude d’artistes, de Black Sabbath à Viktor Lazlo en passant par Rod Stewart et Marvin Gaye. Ce disque est un pur produit belge et luxembourgeois, et il se révèle être intéressant à plus d’un titre. Sur cet opus, 11 morceaux impeccablement interprétés dans lesquels le leader du FBG excelle à la guitare, car le Barreto possède la maîtrise de plusieurs styles. D’ailleurs, l’écoute de cet album qui sent la poudre fait presque office d’exercice de révision, tant il traverse une multitude de styles, d’avant-hier à demain. Car ce bon Fred est un surdoué de la six cordes, et il vous en file des palpitations tout au long des 11 titres. Il avait sorti quelques singles avant de tout regrouper sur cet album, décidé (enfin, avouons-le) à frapper un GRAND coup de tonnerre). Mentionnons en invitée la charmante chanteuse Estrela Fernandes, qui vient en appui au chant extraordinaire du guitariste. De quoi vous faire piétiner d’impatience en attendant de voir Barreto & Co en Live, car autant le disque est un coup de tonnerre, autant en Live ce sera volcan et lave (musicale) assurés. Un MUST post-covid !